Donnerstag, 30. Juni 2011

« Plutôt la Ligue régionale masculine que la coupe du monde de foot féminin »

Claudia Bucher est défenseur latéral du FC Denzlingen. Photo: T.N.
Claudia Bucher, 27 ans, joue au football à haut niveau depuis des années. A côté de son job au centre d’études sur la France de l’Université de Fribourg, le foot est son occupation principale, et avant tout sa passion. Pourtant, la coupe du monde de foot féminin la laisse de marbre. Enfin, presque.
Claudia franchit l’aile gauche dans la moitié adverse. Elle a attaché ses cheveux bruns bouclés. Un petit chasuble doré flotte sur le haut de son corps. Elle réceptionne le ballon avec ses chaussures de foot rouges et noires. Concentration, dynamique. Peu avant la base, elle tire au milieu et fait une passe à une coéquipière qui tire. But !
Pendant l’entraînement de son équipe du FC Denzlingen, l’ambiance est sereine. On y joue, rit, dribble. Et même quelques garçons sont autorisés à jouer. « Mais pas à tirer » plaisante une des joueuses. Avec ses 27 ans, Claudia est la plus âgée de l’équipe, elle est bien concentrée sur son jeu.
Que le coup d’envoi de la coupe du monde de foot féminin soit lancé dans quelques jours en Allemagne la laisse de marbre. « Le foot féminin est moins agressif, moins émotionnel et avant tout beaucoup plus lent que le foot masculin. Avant que je regarde ça à la télévision, je préfère aller voir un match de division ou de première ligue masculine » Elle pourrait se laisser convaincre par un match de finale. « Mais avant cette étape, jamais ! »

Étrange aveu pour une personne qui joue elle-même au foot pourrait-on penser. D’autant plus quand on sait que Claudia soutient passionnément depuis des années le ballon rond dans la lucarne carrée. Comment peut-on trouver son propre sport ennuyeux ? « Jouer soi-même et regarder un match, ce n’est pas la même chose. Le match, c’est ma passion, l'une des choses les plus importantes dans ma vie » explique Claudia.

Claudia Bucher (troisième en haut à gauche) avec son équipe du FC Denzlingen.
Photo: T.N.
Ce désintérêt pour la coupe du monde réside probablement dans le fait que Claudia et ses coéquipières ont commencé à jouer à une époque où le foot féminin en était encore au berceau. « Je joue depuis que j’ai cinq ans, et depuis que j’ai 15 ans dans un club. A cette époque, le foot féminin était encore vraiment inconnu » se souvient Claudia. Elle a grandi avec le football masculin. Quand elle était petite fille, elle jouait au foot tous les jours avec les garçons du quartier sur le terrain de jeu à côté de chez ses parents à Elztal (près de Waldkirch).

Elle a toujours été fan de l’équipe masculine du SC Fribourg (Ligue 1) et son modèle est Heiko Butscher. Quelques jours avant la coupe du monde et son coup d’envoi, elle ne savait pas quand celle-ci commençait, ni même qui jouait. Jusqu’à présent, elle n’a encore jamais vu un match de foot féminin en entier à la télévision. Elle a bien assisté à un match dans un stade, mais elle ne sait plus vraiment lequel. « J’y étais avec des coéquipières. Nous avons beaucoup papoté et je n’ai pas suivi beaucoup du match ». Dans son entourage amical, elle compte beaucoup de joueuses. Pourtant, Claudia ne connaît pas de vraie fan de foot féminin.
Une autre raison pour laquelle Claudia préfère le foot masculin est l’effet sex-appeal. « Je préfère tout simplement regarder des hommes faire du sport que des femmes ». Ça expliquerait aussi peut-être pourquoi, en Allemagne, selon un sondage du journal Zeit Online, les hommes se réjouissent davantage que les femmes de la coupe du monde. Regarder l’autre sexe se donner à fond semble donc sexy. Avec cet argument, Claudia essaye aussi d’attirer les spectateurs masculins aux matchs de son équipe. « Ça vaut le coup de venir, nous ne sommes pas si mal » dit-elle en souriant quand elle remarque qu’un homme n’a pas envie de venir à un match. Parfois ça fonctionne.

Claudia joue au foot depuis son enfance. Photo : T.N.
Claudia a déjà fait la dure expérience des fortes différences entre le football féminin et masculin, avec de grosses défaites lors de matchs amicaux contre des équipes masculines. Il y a quatre ans, elle a disputé un match avec son équipe de la Bezirksliga (5ème ligue) contre une jeune équipe masculine. « Nous avons perdu 15 à 0. Ils sont trop rapides. Aucune chance » dit Claudia. Et pourtant, dans la ligue féminine, c’est son équipe qui dégomme tout. Pour la deuxième fois de suite, le FC Denzlingen a remporté le titre de champion de la Bezirksliga féminine. Après que l’année dernière, l’ascension a échoué par manque d’argent et de joueurs, cette année cela a fonctionné. La saison prochaine, l’équipe de Claudia jouera dans la Oberliga, le quatrième plus haut niveau de jeu en Allemagne. « Notre rêve s’est réalisé, mais nous avons aussi du respect pour cette nouvelle mission » dit Claudia.
Elle s’entraîne dur pour la victoire. Pendant la phase préparatoire, trois à quatre fois par semaine. Pendant la saison, deux à trois fois, à cela s’ajoute les matchs le week-end. « Ça demande énormément de temps, mais c’est un sacrifice que je fais volontiers. Ça procure tout simplement un incroyable plaisir ». Mais faire tomber le maillot pour le succès, comme l’ont récemment fait dans le Playboy des joueuses allemandes de la ligue nationale, Claudia ne le ferait pas. « Nous voulons réussir à avoir du succès par la voie sportive. C’est triste que les filles fassent ça. Mais c’est sûr qu’en termes de marketing, c’est efficace ».

Les photos de nues n’ont sans doute pas été la raison principale d’un match d’ouverture Allemagne-Canada joué à guichets fermés dimanche dernier au stade olympique de Berlin. Une chose est sûre pourtant, la coupe du monde de football féminin prend de la vitesse. 14 millions de personnes ont suivi la retransmission du match d’ouverture sur ARD. Claudia Bucher était l’une d’entre elles. Elle a regardé 20 minutes de jeu. Son plan de départ, allumer la télévision au plus tôt lors de la finale, est déjà compromis.

De Till Neumann / traduit pas Lucie Dupin

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